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Violences policières : à Calais, Darmanin ment ! // Police violence: in Calais, Darmanin lies!
Article repris du GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigré·e·s)
Interviewé par France 3 Hauts-de-France le 9 octobre 2021, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a déclaré [1] :
« […] Ce que je peux dire, c’est que malgré tous les procès d’intention qu’on fait aux forces de l’ordre, je constate que pas un policier et pas un gendarme sur la côte littoral n’a été poursuivi par la justice […] et j’aimerais qu’on les respecte et qu’on les soutienne plutôt qu’on les insulte surtout lorsque manifestement ce sont des mensonges […] »
Il répondait à une question concernant le dernier rapport de Human Rights Watch, « Infliger la détresse. Le traitement dégradant des enfants et des adultes migrants dans le nord de la France » [2] qui met en évidence le harcèlement policier dont sont victimes les personnes migrantes dans le nord de la France.
De quel côté est le mensonge ?
- septembre 2021 : un brigadier-chef CRS est condamné à dix-huit mois de sursis et deux ans d’interdiction d’exercer pour violences volontaires et faux en écriture publique, ainsi qu’à une amende de 6 000 euros de dommages et intérêts pour avoir bousculé violemment et sans raison un bénévole britannique venant en aide aux migrant·e·s, et l’avoir ensuite interpellé pour outrage et violences volontaires sur personne dépositaire de l’autorité publique, en s’appuyant sur les faux témoignages de deux de ses collègues. → « Violence policière à Calais : un CRS condamné, deux relaxés », Politis le 3 septembre 2021
- avril 2021 : un adjudant-chef de gendarmerie est condamné à une amende de 1 500 euros pour le vol de portable d’un migrant lors d’une patrouille à Calais. → « Calais : un gendarme condamné pour le vol d’un portable de migrant, Info Migrants le 24 mars 2021
- mai 2020 : un adjudant de gendarmerie est condamné à trois mois de prison avec sursis pour avoir frappé un mineur afghan → « Violences contre des migrants : quand des gendarmes brisent l’omerta », Mediapart le 29 mai 2020
- novembre 2017 : un agent de la police aux frontières est condamné à six mois de prison ferme, interdit de détention d’arme pendant cinq ans, et interdit de fonction publique pendant deux ans avec sursis. pour avoir giflé un migrant dont il assurait l’escorte jusqu’à la salle de jugement du centre de rétention administrative de Coquelles → « Calais : un policier qui avait giflé un migrant condamné à six mois ferme », France Info avec AFP le 24 novembre 2017
- novembre 2015 : un CRS est condamné à trois mois de prison avec sursis et à une amende de 1 000 euros avec sursis pour avoir frappé un journaliste britannique qui réalisait un reportage TV sur les migrants à Calais. → « Calais : un CRS condamné pour avoir violenté un journaliste anglais », La Voix du Nord, 26 novembre 2015
Ces quelques cas suffisent à démontrer qu’à l’instar des gendarmes et des policiers mis en cause par la justice, le ministre de l’intérieur n’hésite pas à user du mensonge et de l’intimidation pour défendre l’indéfendable. Car dans la plupart de ces affaires, la culpabilité des condamnés n’a été mise en évidence que parce que des preuves incontestables (témoignages de leurs collègues, d’une fonctionnaire du tribunal ou encore enregistrement d’une vidéo) ont fini par balayer leurs dénégations initiales.
Les mensonges du ministre de l’intérieur s’inscrivent dans une inquiétante continuité : en 2009, Éric Besson, alors ministre de l’immigration du gouvernement dirigé par François Fillon, avait soutenu : « j’observe qu’en 65 années (…), personne en France n’a jamais été condamné pour avoir seulement accueilli, accompagné ou hébergé un étranger en situation irrégulière ». Il n’avait pas été difficile, par un recensement aussitôt mis en ligne des multiples condamnations prononcées depuis des années contre des « aidant-es », de montrer que ces déclarations péremptoires étaient des mensonges (voir Délit de solidarité : Besson ment [3]).
Les affirmations de Gérald Darmanin sont d’autant plus scandaleuses qu’en niant contre l’évidence les exactions policières sanctionnées par la justice, le « premier flic de France » fait fi de toutes celles qui sont, depuis des années, documentées avec minutie non seulement par les associations du nord de la France, les ONG et la presse, mais aussi par les autorités administratives comme le Défenseur des droits et la Commission nationale consultative des droits de l’Homme [4].
Il occulte le nombre difficilement quantifiable de celles qui ont fait l’objet de plaintes à l’IGPN et à l’IGGN, ainsi que devant la justice, et qui n’ont donné lieu à aucune poursuite.
En traitant de « mensonges » les faits rapportés dans le rapport de Human Rights Watch, en cautionnant des pratiques inacceptables au lieu de les reconnaître, le ministre de l’intérieur ne fait pas que diffamer cette ONG. Il insulte toutes les personnes qui subissent quotidiennement un harcèlement policier dont la permanence, loin de tenir aux seuls fonctionnaires mis en cause, incarne la logique de dissuasion violente et de mépris raciste qui caractérise la politique migratoire du gouvernement auquel il appartient, comme de ceux qui l’ont précédé.
Le 26 octobre 2021
[1] « Quelles mesures face à la pression migratoire ? En direct : Gérald Darmanin ministre de l’intérieur », France 3 Hauts-de-France
[2] « Infliger la détresse : le traitement dégradant des enfants et des adultes migrants dans le nord de la France, Human Rights Watch, 7 octobre 2021
[3] « Délit de solidarité : Besson ment ! », Gisti, 21 avril 2009
[4] « Rapports et enquêtes concernant Calais » sur le site www.laubergedesmigrants.fr
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Police violence: in Calais, Darmanin lies!
Interviewed by France 3 Hauts-de-France on October 9, 2021, the Minister of the Interior, Gérald Darmanin, said [1]:
“[…] What I can say is that despite all the appeal to motives that are made against the police, I note that not a policeman and not a gendarme on the coastline has been prosecuted […] and I would like them to be respected and supported rather than insulted especially when they are obviously lies […] “
He was responding to a question about the latest Human Rights Watch report, “Inflicting Distress. The degrading treatment of migrant children and adults in northern France” [2], which highlights the police harassment of migrants in northern France.
How is this a lie?
- September 2021: a CRS brigadier-chef is sentenced to an eighteen-month suspended prison sentence and two years’ disqualification form service for intentional violence and forgery of a public document, as well as a fine of 6,000 euros in damages for violently and wantonly shoving a British volunteer helping migrants, and then arresting him for contempt and intentional violence against a person in authority, relying on the false testimony of two of his colleagues. → “Police violence in Calais: one CRS convicted, two released“, Politis on September 3, 2021
- April 2021: a gendarmerie chief warrant officer was fined €1,500 for stealing a migrant’s cell phone during a patrol in Calais. → “Calais: a gendarme sentenced for the theft of a migrant’s cell phone“, Info Migrants on March 24, 2021
- May 2020: a gendarmerie warrant officer is given a three-month suspended prison sentence for beating an Afghan minor → “Violence against migrants: when gendarmes break the omerta” Mediapart on May 29, 2020
- November 2017: a border police officer was sentenced to six months in prison, banned from holding weapons for five years, and banned from public office for two years with a suspended sentence for slapping a migrant whose escort he was providing to the trial room at the Coquelles administrative detention center → “Calais: a policemen who had slapped a migrant sentenced with 6 months without bail“, France Info with AFP on November 24, 2017
- November 2015: a CRS was given a three-month suspended prison sentence and a €1,000 suspended fine for hitting a British journalist who was doing a TV report on migrants in Calais. → “Calais : a CRS policeman sentenced for brutalizing an English journalist” La Voix du Nord, November 26, 2015
These few cases are enough to demonstrate that, like the gendarmes and police officers implicated by the courts, the Minister of the Interior does not hesitate to use lies and intimidation to defend the indefensible. For in most of these cases, the guilt of the convicted was only brought to light because incontrovertible evidence (testimony of their colleagues, of a court official or even a video recording) finally swept away their initial denials.
The lies of the Minister of the Interior are part of a disturbing continuity: in 2009, Eric Besson, then Minister of Immigration in the government led by François Fillon, had maintained: “I observe that in 65 years (…), no one in France has ever been convicted for having only welcomed, accompanied or housed an illegal alien.
It was not difficult, through a census immediately posted online of the multiple convictions pronounced over the years against “aidings”, to show that these peremptory statements were lies (see Délit de solidarité : Besson lies [3]).
Gérald Darmanin’s assertions are all the more scandalous because, by denying against the evidence the police convictions sanctioned by the courts, the “top cop in France” is ignoring all those that have been, for years, meticulously documented not only by associations in the north of France, NGOs, and the press, but also by administrative authorities such as the Defender of Rights and the National Consultative Commission for Human Rights [4].
It conceals the hardly quantifiable number of those that have been the subject of complaints to the IGPN and the IGGN, as well as to the courts, and which have not led to any prosecution.
By calling the facts reported in the Human Rights Watch report “lies” and by condoning unacceptable practices instead of acknowledging them, the Minister of the Interior is not only defaming this NGO. He is insulting all those who suffer daily police harassment, the permanence of which, far from being limited to the officials involved, embodies the logic of violent dissuasion and racist contempt that characterizes the migration policy of the government to which he belongs, as well as those that preceded him.
October 26, 2021
[1] « Quelles mesures face à la pression migratoire ? En direct : Gérald Darmanin ministre de l’intérieur », France 3 Hauts-de-France
[2] « Infliger la détresse : le traitement dégradant des enfants et des adultes migrants dans le nord de la France, Human Rights Watch, 2021 october 7
[3] « Délit de solidarité : Besson ment ! », Gisti, 2009 april 21
[4] « Rapports et enquêtes concernant Calais » on website www.laubergedesmigrants.fr
Message des réfugié-es de Calais après la mort de notre frère / Message from the refugees after the death of our brother
Mardi 28 septembre dernier, Yasser, un jeune homme soudanais est décédé à la frontière franco-britannique. Malgré sa peine, sa famille a choisi d’enterrer le corps de Yasser à Calais. Des proches de Yasser et des membres de la communauté soudanaise de Calais ont écrit la lettre suivante, disponible en français, arabe et anglais.
Jour après jour, nous appelons. Mais personne ne nous entend. C’est le langage de nos cœurs ici à Calais. Calais est une très belle ville, mais nous vivons simplement derrière un rideau de beauté. Nous ne pouvons voir les lumières ni de la vérité, ni de la liberté, ni de la sécurité à Calais.
Nous sommes venus dans cette ville parce que nous avons un petit objectif. Nous vivons dans l’espoir que demain sera peut-être meilleur. Mais nous devons demander, pourquoi l’univers ne nous permet pas d’atteindre notre futur, notre liberté, notre sécurité ?
Chaque matin à Calais, il y a une nouvelle épreuve. Nous vivons en sachant que nos amis qui sont avec nous aujourd’hui ne seront peut-être plus avec nous demain. La mort est dans nos yeux, la peur et l’anxiété ne quittent pas nos esprits.
Nos vies sont pleines d’histoires, mais elles sont très tristes et douloureuses.
Aujourd’hui, nous avons perdu le sourire de notre cher frère Yasser. Hier encore, il jouait avec nous.
Nous marchons sur les routes pendant la journée mais la peur ne nous quitte pas. Puis nous essayons de manger mais nous ne goûtons que la tristesse. Nous buvons de l’eau mais nous n’étanchons pas notre douleur. Quand la nuit arrive à Calais, c’est calme. Nos yeux essaient de se reposer mais nous n’avons pas d’endroit pour dormir. Tout cela parce que nous avons un petit objectif.
La police de Calais. Nous nous demandons de temps en temps : pourquoi toute cette cruauté de votre part ? Vous savez que nous ne sommes pas vos ennemis.
Nous vivons dans les bois, loin de vos yeux, parce que nous vous craignons. Pourtant, vous venez tôt le matin et prenez nos affaires de fortune comme s’ils n’étaient rien pour vous mais vous savez très bien qu’ils sont tout pour nous. Nos maisons. Sans humanité, vous nous laissez à l’air libre avec le froid qui nous pince et la pluie sur nos têtes comme si nous n’étions pas des êtres humains.
Puis si nous essayons de partir pendant que vous détruisez nos biens, nous sommes battus et gazés par certains de vos membres. Ensuite, vous nous faites monter de force dans des bus du gouvernement en direction d’endroits lointains que nous n’avons jamais vus auparavant, en prétendant que tout cela est pour notre «protection». Pourquoi ne nous demandez-vous pas notre avis avant ?
Les chauffeurs routiers. Lors de nos tentatives de passage de la frontière en camion, nous subissons des blessures répétées qui entraînent des fractures, des blessures graves voire la mort. Nous pensons que chaque blessure que nous avons reçue avait une intention délibérée de la part des chauffeurs.
C’est clair, lorsque vous, le conducteur, remarquez qu’un réfugié se trouve dans le camion. Vous secouez le camion et appuyez sur les freins encore et encore jusqu’à ce que nous lâchions prise. Vous savez que nous allons tomber et nous casser une épaule, une main, une jambe ou la colonne vertébrale. Mais cela ne vous suffit pas. Lorsque nous tombons au sol, vous nous frappez sérieusement. Vous vous éloignez et continuez votre chemin. Quand nous ouvrons les yeux, nous sommes à l’hôpital, encore une fois. Pourquoi ne pouvons-nous pas continuer notre voyage ?
Les organisations humanitaires et l’aide médicale à Calais. Nous profitons de cette occasion pour remercier chaleureusement les personnes qui portent les vestes d’aide humanitaire à Calais. Merci pour le travail que vous faites encore et encore. Vous sauvez la vie de nos frères et sœurs blessés. Nous vous devons beaucoup. Nous remercions également nos frères et sœurs des organisations qui nous aident en nous fournissant de la nourriture, de l’eau et des douches.
Pour Yasser.
De la part des réfugiés de Calais, 2021.
A young girl died at the border // Une fillette meurt à la frontière
Cops and borders killed once again.
In the night from wednesday 16th to thursday 17th, a van driving on the E42 didn’t stop at a police control in the area around Namur (Belgium). The police started chasing them. In unclear circumstances the cops then shot the van. When the van was finally blocked, near Mons, 30 people (“migrants”, in the medias) were found inside, 4 of which were minors. Everybody was arrested, but a little kurdish girl, aged of 2 or 3, who died in the ambulance.
The autopsy gave as reason of the death a bullet found in the girl’s cheek (article in French).
The girl and her parents had been living in Grande Synthe (Dunkerque) and trying to cross to the UK for around a month. Many people that were close to the family and living in the same gym (opened by the town hall to shelter part of the migrant population of the area through winter) blocked spontaneously the A16 Thursday May 17 morning-midday in protestation (see in french here).
People are shocked and made angry by what happened.
We do not forgive, we do not forget.
We will remember you.
Open the borders, they kill and always will!
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Les flics et les frontières tuent une fois de plus.
Dans la nuit de mercredi à jeudi,une camionnette circulant sur la E42 a tenté d’éviter un contrôle de police dans la région de Namur (Belgique). S’en est suivi une course-poursuite, et, dans des circonstances troubles, la police a ouvert le feu sur le véhicule. Quand le van a finalement été arrêté dans la région de Mons, 30 personnes ont été trouvées à l’intérieur, parmi lesquelles 4 mineur-e-s.
Toutes ont été arrêtées, sauf une petite fille kurde, âgée de 2 ou 3 ans, décédée dans l’ambulance.
L’autopsie conclut que la fillette est décédée d’une balle trouvée dans sa joue.
L’enfant et ses parents habitaient à Grande Synthe, et tentaient le passage vers l’Angleterre depuis à peu près un mois. De nombreuses personnes proches de la famille et habitant le même gymnase (ouvert par la mairie pour abriter une partie des éxilé-e-s des environs pour l’hiver) ont bloqué spontanément l’A16 ce jeudi 17 mai toute la matinée, en signe de protestation (voir ici )
Les citoyen-ne-s, quelle que soit leur situation administrative, sont choqué-e-s et excédé-e-s par ce qui s’est passé.
Nous ne pardonnons pas, nous n’oublions pas.
Nous nous rappellerons de toi.
Ouvrez les frontières, elles tuent et tueront toujours!
De l’huile sur le feu
Comment (presque) provoquer une émeute, ou la police française dans la Jungle
Mardi dernier la police de Calais a créé un dangereux mouvement en mettant de l’huile sur le feu pour faire s’embraser les violences dans un moment déjà très tendu sur la Jungle. Si les violences éclatent, l’Etat aurant du sang sur les mains. Pour l’instant, les différentes communautés de la Jungle se sont refusées à mordre à l’hameçon que l’Etat leur tend.
Dans la nuit du Lundi d’avant, une bagarre a explosé sur l’autoroute près de Marck, principalement entre des groupes d’Afghans et de Soudanais tentant de faire la traversée pour le Royaume-Uni. La police est intervenue avec des canons à eau pour disperser la foule. Dans le courant de la nuit, 15 Soudanais ont été hospitalisés, dont un blessé gravement, et un a été tué. Les circonstances exactes entourant sa mort restent floues.Mardi, une bande d’au moins 20 policiers – des CRS et la Police Judiciaire – sont entrées dans la Jungle vers 18 heures. Ils ont marché jusqu’à l’intersection sur la rue principale, où les quartiers Soudanais et Afghans se rejoignent, se sont mis en formation, les armes prêtes à servir et semblent avoir affiché une seule photo sur le mur d’un bâtiment.
La photo était apparemment un gros-plan de l’homme tué la nuit d’avant. Mort, donc.
Les policiers sont réstés en formation et regardaient, l’un deux filmant les passants. Ils ont ensuite continué leur défilé à travers la Jungle, pour enfin se retirer et se cacher dans le parc à containers de La Vie Active, protégés par les grillages et les vigiles de la sécurité privée entourant celui-ci. Avant de partir, se démarquant car filmé par un militant, un des hommes de la Police Judiciaire a physiquement menacé le militant, l’agrippant pendant qu’un de ses collègues l’avertissait lui de vive voix en lui disant “take care” à 3 reprises d’un air effrayant.
Une fois les policiers partis, les tensions ont commencé à augmenter. Les conversations se répandaient dans la jungle comme une traînée de poudre. Les groupes habituels de deux ou trois personnes sur la rue principale étaient remplacés par des groupes beaucoup plus gros – cinq, dix, quinze – principalement rassemblés par nationalité.
L’insulte et l’indignation étaient particulièrement palpables dans le quartier soudanais. Un de leurs frères avait été tué la nuit précédente et la police ajoutait insulte et manque de respect à la tragédie, photographiant le mort et l’affichant ensuite en plein milieu de la place pubique, comme une menace imminente ou un trophée exhibé à travers rues.
Des Africains de différentes nationalités ont commencé à se rassembler et les Afghans, munis de battes de cricket, de tuyaux et de planches de bois, ont commencé à emplir les rues, fourmillant, les tensions augmentant encore.
Etrangement, l’après-midi s’est terminée dans un calme relatif, bien que le risque de violences était loin d’être terminé. Plusieurs informations concordaient à dire que les représentants communautaires ont entrepris de désamorçer les tensions avant qu’elles ne se transforment en violences sérieuses. Tandis que les tensions latentes entre les différentes communautés de la Junglesont sans-cesse exacerbées par l’Etat, via les démantèlements et la surpopulation qui en résultent, l’intervention de la police concernant ce meurtre semblant au mieux profondément irresponsable, voire franchement criminel au pire.
Quoi qu’il en soit des circonstances de la mort de cet homme, afficher une photo d’un corps, mort, dans un endroit public à la jonction géographique entre les deux premières communautés impliquées est une insulte à la personne décédée et à la communauté. C’est également une incitation à la violence.
Comme répandre des rumeurs pour entretenir les tensions existantes, les agissements de la police semblent avoir eu clairement pour but d’inciter la violence dans la Jungle, comme cela était arrivé en février. Après l’affichage de la photo, ils sont partis, invisibles. Ils ont mis le feu aux poudres avant de s’enfuir.
L’absence de violence après le décès de l’homme Soudanais et les “investigations” (si on peut appeler cela comme ça) de la police qui suivirent sont la preuve d’une maturité collective réussissant à gagner malgré les circonstances largement défavorables. Les agissement de la police ont fourni, plus que le bois, aussi la poudre et l’étincelle pour mettre le feu dont on n’est vraiment pas passé loin. Avant que la police ne s’en mêle, la violence entre les communautés était une possibilité bien réelle ; après leur intervention elle semblait presque inévitable. Néanmoins le moment est passé. Correctement.
Bien sûr, la police niera toute mauvaise intention et soutiendra qu’ils enquêtaient juste sur le décès de la nuit précédente et cherchaient des témoins ou de nouvelles informations (en accrochant une photo sans donner d’explications à personne ni poser de questions, oui c’est comme ça qu’on enquête en France apparemment). Mais certaines pratiques ne doivent pas être passées sous silence. La police et la préfecture savent que le nettoyage (le démantèlement comme on l’appelle pour rester courtois) de la Jungle rencontre de nombreux obstacles, autant à cause des gens vivant ici que des retombées politiques de l’action lourde qu’une éviction majeure provoquerait inévitablement.
Si la colère ambiante de 9 000 personnes (sur)vivant dans des conditions bien souvent inhumaines peut être utilisée comme un outil pour, de un, détruire des morceaux de la Jungle par elle-même (à travers émeutes, incendies volontaires, etc.) et comme un prétexte pour, de deux, intensifier les violences policières, alors la police fera très certainement de son mieux pour exploiter et encourager cette colère. Ce qu’ils ont fait Mardi à la perfection.
Ce qui, ce Mardi, aurait pu apparaître comme l’une des plus innoffensives interventions des flics dans la Jungle, n’est vraiment pas passé loin de devenir l’une de leurs plus destructrices. Jusqu’à présent, l’équilibre a tenu malgré d’immenses conflits. Mais s’il se rompt, l’Etat français aura du sang sur les mains.
Fuel
How to (nearly) incite a riot: Lessons from the French police in the Jungle
On Tuesday the Calais police made a dangerous move to fuel violence in an already-tense moment in the Jungle. If violence erupts, the state will have the blood on their hands. For now, the communities in the Jungle have refused to rise to the bait.
On Monday night, conflict broke out on the motorway near Marck, between predominantly Afghan and Sudanese groups attempting to make the crossing to the UK. The police were called in with water cannons to disperse the crowd. In the course of the evening, 15 Sudanese were hospitalised and one was killed. The exact circumstances surrounding his death remain unclear.
On Tuesday, a gang of at least 20 cops – some CRS, some Police Judiciare – entered the Jungle at approximately 6pm. They marched to the intersection on the main road where the Sudanese and Afghan neighbourhoods meet, held formation, weapons ready, and seemed to post a single photo on the wall of a building.
The photo was apparently a close-up image of the man who had been killed the night before. Dead.
The police stood in formation and watched, with one filming those passing by. They then marched through the Jungle, concealing themselves in the La Vie Active container park, surrounded by fences and private security. Before leaving, one of the Policia Judiciare, having his unmarked car filmed by an activist, physically grabbed and threatened the activist, while a colleague threateningly told them to ‘Take care.’
Once the police were gone, tensions began to rise. The conversations spread throughout the Jungle like wildfire. The usual groups of twos and threes on the main road were replaced by bigger groups – five, ten, fifteen, mostly divided by nationality.
The outrage in the Sudanese quarter was palpable. One of their brothers had been killed the night before, and the police had piled insult and disrespect onto the tragedy, by photographing the deceased and then posting the photo in the middle of a public place, like a looming threat or a game trophy to be paraded through the streets.
Africans of different nationalities began to group together and Afghans with cricket bats, pipes and planks of wood began to fill the streets, milling about, as tensions rose.
Remarkably, the afternoon ended in relative calm, though the possibility of violence has far from gone. Several reports have said that community leaders managed to defuse tensions before they erupted into serious violence. While the ongoing tensions between different communities in the Jungle are constantly exacerbated by the state, via evictions and the resulting overcrowding, the police intervention surrounding this murder seemed deeply irresponsible at best, and outright criminal at worst.
Whatever the circumstances surrounding this man’s death, to post a photo of a dead body in a public place, at the geographic juncture between the two primary communities involved, is an insult to the deceased and to the community. It is also an incitement to violence.
Like spreading rumours to stoke existing tensions, the police’s move appears to have been aimed at inciting violence in the Jungle, as happened in February. After the photo posting, they left and were not to be seen. They chucked a match into the petrol and then walked away.
The lack of violence following the death of the Sudanese man and the following instigations by the police, is a testament to a collective maturity winning out in the Jungle under massively unfavourable circumstances. The actions of the police provided more than the kindling, but also the spark for a wildfire that very nearly was. Even before the police arrived, violence between communities was a very-real possibility; after their intervention, it seemed almost inevitable. Yet the moment passed.
Of course, the police will deny any ill-intent, and argue that they were simply investigating the death of the night before and searching for witnesses or new information. But such tactics must not be allowed to pass unnoticed. The police and the prefecture know that clearing the Jungle faces many obstacles, from both the people living there, as well as the political fall-out of the heavy-handed action that a major eviction would inevitably require.
If the boiling anger of 9,000 people living in often-subhuman conditions can be used as a tool to either destroy parts of the Jungle itself (through riots and arson, etc), or as a pretext for escalating police violence, then the police will surely do their best to exploit and encourage this anger. Which is what they did on Tuesday.
What may appear one of the cops’ more innocuous interventions into the Jungle on Tuesday, very nearly became one of their most-destructive. So far, the levee has held against immense odds, but if it breaks, the state will have blood on its hands.
Pegida and Police fight in Calais!
Well, maybe fight is too strong a word, but for the first time today French patriots will be happy to know that valuable French policing resources, including CS gas, have not been all used up on migrants! It was also refreshing, although a little odd, to watch the French police throw to the ground and arrest someone in a black hoodie without any CMS folks feeling the need to panic.
At around 1pm yesterday about 150 Pegida gathered at Calais Ville train station to deliver their hatemongering message, and were disappointed to find that, (though the prefecture had already told them the demonstration would not go ahead) the demonstration was not going ahead! Before the demo Pegida claimed that they were expecting 800 to 1,000 numpties to make it to Calais, so with these low numbers and a lack of visible local support the day seems to have been a bit of a wash out.
As well as French flags there were masked men sporting the iron cross, showing that Pegida cannot deny their association with neo-nazis. Among the 20 reported arrests are Pegida leader Loïc Perdriel and figurehead General Piquemal – so Pegida will be unable to blame conflict with police on rogue members.
Despite the heavy policing of the Fascists, showing that the police are not their allies as they may have hoped, the ban on this demonstration seemed largely to focus on the percieved ‘threat to public order’ posed by a counter demo. Opposition to Pegida from locals, migrants, associations and humanitarian volunteers was intimidated both by the threat of attacks from fascists and the threat of heavy policing. Associations in the jungle warned volunteers to stay out of town ahead of the demo, hindering the possibility of a visible pro-migrant presence on the streets.
On this occasion police partially contained a dangerous fascist presence, and the rare sight of our enemies fighting each other warmed our hearts. However, this is limited cause for celebration when we know the new state of emergency ban on demonstrations will also be used against migrant and pro-migrant demonstrations, probably with more heavy handed tactics. Further, the police continue to do nothing about the continued attacks on migrants in Calais and there are concerning speculations that an attack by an ‘armed militia’ last Thursday may be associated with off-duty police.
Police Blockade Vehicle Access to Jungle/ Barrage de police pour les accès en véhicule à la Jungle
For the last three days, the police have been restricting car or vehicle access to the jungle, to just those who belong to ‘recognised associations’ that are known to work in Calais. There are only two ways to drive to the jungle, and the police have made check points at these entrances, and access is only available for vehicles carrying an association card.
This started on Sunday, when the jungle is normally full of people making distributions over the weekend. Barely any distributions were able to take place. Locals, from Calais and the surrounding area were also not able inside to visit friends.
In the media the police are saying they are just trying to control the flow of traffic, but this is bullshit. The motivation for this is simple, the police are trying to isolate the jungle, cracking down on humanitarian aid and the unprecedented solidarity movement that has grown around the situation in Calais.
General police presence around the jungle is also increasing everyday. Now the foot patrols the police make through the jungle are lasting for longer and longer. There are often police cars parked along the street that runs up to Jules Ferry, outside pedestrian access to the camp. Also where people go to use the internet.
The police operation of mass arrests and dispersals from the Channel Tunnel and the port is also continuing. We have also been hearing of massive ID controls happening in the centre, at the moment we don’t know if people arrested in these controls are also being subjected to dispersal to other CRA (detention centres). 50 people are being transferred from Calais everyday to detention centres across France, and it is set to continue like this for a while.
Pendant ces trois derniers jours, la police a restreint les accès à la Jungle pour les voitures ou autres véhicules, uniquement à ceux qui appartiennent aux “associations reconnues” pour leur travail à Calais. Seuls deux voies existent pour conduire jusqu’à la Jungle et la police font des checks-points sur ces entrées,où l’accès est reservé aux véhicules ayant une carte associative.
Ceci a commencé dimanche lorsque la Jungle est normalement pleine de personnes faisant des distributions tout le week-end. Quelques distributions ont pu difficilement avoir lieu. Les habitants, de Calais et des alentours, ne pouvaient pas rendre visite à leur amis non plus.
Dans les médias, la police affirme qu’ils essaient juste de contrôler le trafic, mais ça c’est de la merde.
Leur motivation à faire ça est simple : ils essaient juste d’isoler la jungle, de sévir contre l’aide humanitaire et le mouvement de solidarité sans précédent qui s’est formé autour de la situation à Calais.
La présence de la police en général et autour de la Jungle augmente tous les jours. Maintenant, les patrouilles à pied à travers la jungle durent de plus en plus longtemps. Il y a souvent des voitures de police garées le long de la rue menant à Jules Ferry, l’accès piéton extérieur à la jungle. Ainsi qu’à l’endroit où les gens vont pour avoir internet.
Les opérations de police d’arrestations massives et de dispersion au Tunnel sous la Manche et au port continuent également. Nous avons aussi entendu parler de contrôles d’identité en masse ayant eu lieu en centre-ville. Pour l’instant nous ne savons pas encore si les gens arrêtés lors de ces contrôles sont également concernés par leur dispersion dans d’autres CRA (Centre de Rétention Administratif). 50 personnes sont ainsi transférées de Calais chaque jour vers des centres de rétention à travers la France et ce n’est pas prêt de s’arrêter pour le moment.
Systematic arrest and dispersal of people at the Eurotunnel / Début d’une grande opération policière à Calais
Around 50 people were arrested in the Channel Tunnel on Tuesday night, mostly from Syria. Today they were transferred to a detention centre in Nimes.Tomorrow, people are expected to be taken to Toulouse. The next day Paris. They are targetting people from all communities, Sudan, Eritrean, Syrian, Iraqi…It is likely that they plan to carry on making mass arrests in the Channel Tunnel.
This news comes from the association La Cimade, who work in detention centres in different places across France. The full announcement can be read here in French. They say this is the beginning of a massive police operation in Calais. Most of these arrests will not lead to deportation, but they will lead to a massive and repeated dispersement of people across France. People will have to make a long journey back to Calais to try again.
When inside the detention centres, people are receiving threats of deportation and face serious violence from the police trying to make them give their fingerprints in France.
For the last 4 weeks police have made patrols of the jungle (normally mostly around the area that has just been announced for the place of the new camp), and they have always been present around the Jules Ferry Centre. Yesterday there was a higher police presence around the jungle than usual. For many, it seems like they are stepping up intimidation to make sure that the people who need to move will do so without resistance. And as ever, there is pressure to give up on their journey to the UK and make their asylum claim in France.
This all comes the day after Cazneuve promised 460 more police for Calais.
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Une cinquantaine de personnes ont été arrêtées dans l’Eurotunnel dans la nuit de mardi; la plupart originaires de Syrie. Aujourd’hui (22 octobre) elles ont été transférées au centre de rétention de Nîmes. Demain, elles seront normalement transférées à Toulouse. Le jour suivant à Paris. L’état cible des personnes de toutes les communautés. Soudanaises, Erythréennes, Syriennes, Iraqiennes… Les forces de l’ordre semblent poursuivre dans leur volonté d’effectuer des arrestations massives dans l’Eurotunnel.
Cette nouvelle vient de l’association “La Cimade”, qui travaille dans de nombreux centre de rétention en France. Cette annonce peut être lue dans son intégralité ici (here), en français. Pour la Cimade, ces arrestations annoncent le début d’une grande opération policière à Calais. La plupart de ces arrestations ne se solderont pas par des déportations, mais elles s’inscrivent dans une volonté de disperser les personnes présentes à Calais sur tout le territoire français. Ces personnes devront alors traverser la France à nouveau pour revenir à Calais et essayer, encore une fois, de passer en Angleterre
Lorsqu’elles sont à l’intérieur des centres de rétention, ces personnes doivent faire face à des menaces de déportation, d’expulsion, et sont confrontées à de sérieuses violences de la part des policiers qui veulent qu’elles déposent leurs empreintes.
Il y avait une bien plus forte présence policière autour de la jungle ces derniers jours. Depuis deux semaines, la police effectue des patrouilles dans la jungle (très souvent autour de la zone récemment annoncée pour accueillir le futur centre de 1500 places) . La police est aussi très souvent présente autour du centre Jules Ferry, et aujourd’hui, toute la journée, elle était installée dans de nombreux points tout autour de la jungle.
Pour beaucoup, cette volonté croissante d’intimider les personnes vivant dans la jungle a pour but de faciliter le déplacement de ces dernières au moment voulu sans qu’il n’y est de résistance, mais aussi de faire renoncer ces personnes dans leurs tentatives de passage et les pousser à demander l’asile en France.
Footage from Police Tear Gas Attack of 7th October
This shows just how little it takes for the police in Calais to fire tear gas into people’s homes. There were several other incidents of tear gas being fired into the camp in the few hours after this one, each one aimed further into the camp, where people live, including children.
For more info, see this post:
https://calaismigrantsolidarity.wordpress.com/2015/10/08/tear-gas-attack-on-the-jungle-again/
Calais migrants pepper sprayed by Police.
New video shows an unprovoked attack by security forces.
The everyday violence against #Calais #Migrants. New video of an unprovoked police tear gas attack. #ACAB #NoBorders pic.twitter.com/a8jRll5fjU
— Calais Solidarity (@calaisolidarity) October 11, 2015
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